55 rue du Bourg, les nouveaux propriétaires...

Après plusieurs mois d'indécision à parcourir les ruelles et et plus grandes artères de la cité thiernoise, la jeune hispanique avait eu un réel coup de coeur pour une chaumière qui de l'extérieur ne payait pas de mine, mais présentait bon nombre davantage, à commencer par un étage qui surplombait la place principale d'une part, et de l'autre le marché.

Son emplacement non loin des échoppes des amoureux, ainsi que de leur taverne les avaient poussés à se renseigner au cadastre, mais au vu de l'état général de la maison, la réponse ne fut pas une surprise, lorsqu'on leur indiqua que l'objet de leur convoitise était laissée à l'abandon depuis bien longtemps.

Clés en main, le coeur en fête, Weylin et sa promise allèrent prendre possession de leur bien. Poussière, et toile d'araignée, ainsi qu'un air confiné les accueillirent, cependant quelques meubles ayant survécut à cet abandon, n'avaient pas échappé aux regards de l'homme habile à travailler le bois.
Luz virevoltait dans la demeure, se réjouissant d'un rien, peu dans ses habitudes certes, mais se surprenait à s'imaginer en ces lieux, installée dans un quotidien auprès de celui qu'elle aimait, sans crainte de la routine, et laissant entrevoir une vie merveilleuse.

Sentant le regard bienveillant de son homme, l'andalouse espiègle alla se lover dans ses bras, si sécurisant et empreint d'amour, gardien de son équilibre depuis bien des mois.
Un baiser sur son front eut don de lui remémorer des souvenirs, souvenirs d'une année passée, étrange année au cours de laquelle les jeunes gens s'étaient rencontrés dans une taverne de Langres, puis de là était née une amitié, qui avait donnée naissance à une longue correspondance.
Un homme épris et une jeune fille en fuite aussi mystérieuse qu'impulsive, qui aurait cru un seul instant, que de cette rencontre naitrait si grand amour ?

Levant son regard ambré sur son ange, car malgré sa virilité sans faille, cet homme était un ange tombé du ciel juste pour la combler de bonheur.

"Alors mon Ange qu'en dis tu ?"

Féline, joue posée sur son torse, Luz respirait l'odeur de sa peau, berçait par sa voix sensuelle...

Prise de frénésie à la découverte de toutes ces pièces, et dont la dernière avait fini de la mettre en liesse, l'hispanique follement éprise, vint à son futur époux pour le plus ardent des baisers.
Les joues rosies d'excitation, elle hurla littéralement

"Allons à la taverne chercher de quoi nettoyer notre maison, des draps, et nos affaires.....et ne songe pas à travailler aujourd'hui, car en cette journée Weylin Tailhac, nous avons une mission, et je suis sure que tu vas adorer ! Dès cette nuit nous dormirons ici même dans une maison rutilante de propreté, où toute trace de saleté si mince soit elle aurait quitter ces lieux....tu m'en fait la promesse hein ?"


De son regard de biche aux abois, sa Lumière le contemplait, venant appuyer sa requête d'un sourire angélique auquel ce séducteur né, n'avait jamais pu résister.
Emprisonnant ses doigts aux siens, et sans attendre sa réponse, la brune faisait déjà le détail des lieux, et chaque pièce passa en revue... longue tâche que voilà pour une seule journée, mais à force de travail et de patience...Luz en était visiblement déjà épuisée rien qu'à l'énoncé, mais pourtant l'ancienne noble, puisa en elle, cette femme forte qu'elle était devenue, et laissa de côté l'enfant oisive qu'elle avait été...

La visite touchait à sa fin, lorsque la belle se colla à lui pour lui voler un baiser des plus passionné auquel, sans hésité il répondit fougueusement. La petite était toute excitée à l'idée d'avoir enfin leur maison, qu'elle avait décidé de ne plus attendre et dès cette nuit, mais avant cela, ils avaient du pain sur la planche!

Suivant, toujours limite en courant sa princesse, il prenait bien note de toute les référence qu'elle voulait, de tout ce qu'il fallait faire et déplacer dans les pièces, et une fois tout répertorié, il se mit au boulot avec sa chérie ...
La poussière déguerpissait, les araignée sortait à vue d'oeil par les ouverture bien ouverte de la maison, le ménage de printemps avant l'heure c'était à l'image tout à fait cela. Les journées se réchauffaient, le jour combattait de plus en plus les nuits noirs, mais c'était encore un peu tôt pour parler à proprement dit de printemps!
mais les jeunes tourtereaux n'en était pas moins déterminé et motivé pour enfin passé une première nuit dans cette maison, que dit-je dans leur propre maison...

Après de nombreuse gouttes de sueurs qui coulait sur les muscles des deux amoureux, et la fatigue qui s'accumulait, les premiers sourires de satisfactions se faisaient apercevoir, la maison prenait enfin vie, leur vie, leur univers à eux et seulement eux...
Le charpentier regardait sa femme et tout deux savait qu'il leur restait qu'une chose à faire pour que ça soit terminé, mais cette tâche, ils voulaient, sans être concerté auparavant, la faire tous les deux ensemble, limite main dans la main, même si cela ne serait pas des plus pratique...
Souriant, les voici devant leur lit, drap à la main et de geste des plus harmonieux entre eux le lit se retrouva vite bien agréable à l'œil et des plus accueillant, ce qui ne fallait pas plus pour qu'innocemment, le petit bout de femme qu'était Luz, choisisse son coté pour dormir et s'y allongea attendant son mari...

Le corps poisseux après une interminable journée de nettoyage, Luz n'avait pas eu la plus judicieuse des idée en s'allongeant, aussi d'un bond la brune fut au pied du pied, et inspecta son fiancé.

"Hmm messire Tailhac, nous voici dans une maison quasi rutilante de propreté mais nous concernant hélas....il reste un effort à faire avant notre repos bien mérité."

Sa chemise blanche, bien plus fraiche en début de matinée, plaquée à même la peau, laissait apercevoir un torse large et puissant, qui embrassa le regard de l'hispanique.
Déjà son idée faisait chemin, car ayant astiqué le moindre recoin, ils avaient pu juger que cette maison était aisément meublée malgré son abandon, les propriétaires avaient du partir à la hâte, ou bien étaient morts prématurément .... Une chose était sure, les nouveaux propriétaires étaient des chanceux de pouvoir bénéficier d'autant de "luxe".

Toujours son idée à l'esprit, Luz sorti de la chambre pour ce rendre dans cette pièce privilégiée, la fameuse salle d'eau... d'un regard, mesurant ce dont elle avait besoin pour assouvir ce besoin d'effacer la sueur de son corps, elle s'adressa au jeune homme:

"Mon ange dès demain, il nous faudra transférer ton stock de bois... Mais entre ma forge, la four de la taverne, celui ci et l'eau à chauffer pour les bains... je crois que tu vas déboiser Thiers"

D'un sourire malicieux, mais d'où l'ingénue avait grandement sous entendu son attente, il n'en fallut pas plus à Wey pour comprendre l'idée assez séduisante de la belle.
D'un air entendu, il lui vola un baiser avant de partir à la forge chercher quelques stères, et profita de la charrette, pour faire un voyage d'effets personnels, vidant ainsi leur chambre au dessus de la taverne. Peut être maintenant qu'ils n'allaient plus occuper les lieux, cet étage pourrait être aménagé en plusieurs chambres pour les voyageurs...
Cela méritait réflexion, mais cela ajoutait une charge supplémentaire, et le charpentier désirait profiter pleinement de sa future épouse, vivre une vie à deux ...

Tout à ses pensées, un sourire étira son visage lorsqu'il se retrouva devant leur nouvelle maison, Luz lui faisant signe de la fenêtre de leur chambre.
La malicieuse épiait déjà à l'affut des potins, les gens qui se saluaient avant de regagner leur taverne favorite.

Ce soir, pas question de taverne, une fermeture exceptionnelle serait la bienvenue, les amoureux avaient en tête bien des projets plus intéressants....

Quelques jours plus tard...

Les jours défilaient à grande vitesse, l'anxiété grandissait chaque jour tout comme l'impatience, et en ce jour d'essayage le passé se rappela à elle...

Luz n'était plus à Thiers sa terre d'asile, mais dans une contrée hispanique sa terre natale, qui en cet instant lui manquait.
D'ici peu elle allait s'unir à l'homme de sa vie, son unique amour, mais ses parents ne seraient pas là pour bénir cette union...

Comme la vie réservait des surprises...

Lorsqu'elle arriva chez la couturière, sa mine inquièta la petite main, qui l'invita à débuter rapidement l'essayage de peur que la belle prenne la fuite. Elle en avait vu des jeunes filles se dérober avant les noces, mais Luz était sure de son choix, la cause elle ne la savait que trop, le mal du pays.

Passant le soyeux organdi hors de prix que Weylin avait tenu à lui offrir, l'andalouse ferma les yeux et l'espace d'une seconde elle fut chez elle, revêtissant sa robe de bal, celui de ses dix sept ans.
La voix de sa mère rassurante, et si douce, la fierté de son père à son entrée dans le patio... sa nourrice, celle qui l'avait gardée en son sein comme sa fille... Lina sa soeur de lait, partie bien tôt en Normandie chez une bonne famille .... tant de chose s'était passée en une année, dont la plus merveilleuse, tomber amoureuse.

La voix fluette de Mary, la petite main, qui avait réalisée une robe de mariée des plus sensationnelles, une robe unique digne de sa vie fastueuse d'antan.
La "De la Paz" n'était plus vraiment, sauf dans son coeur, mais bientôt elle serait une Tailhac.

Face à son reflet, soudain elle su qu'en ce 12 mars, "ils" seraient à ces côtés, tous ses gens aimés par le passé qui subsistaient encore dans son coeur.
Les craintes fondirent comme neige au soleil, laissant entrevoir un avenir radieux, tournoyant sur elle même, la jeune fille se mit à sourire à son image grisée par ce bien être qui l'envahissait.

"Mary !!!!! tu as fait des merveilles... cette robe est purement et tout simplement suuuuuublime !!!!"

Étreignant chaleureusement la couturière, Luz lui donna deux bises sonores, sautillant comme une enfant un matin de Noël.
Se dévêtissant prudemment pour ne rien endommager, l'esprit enfiévré de la brune n'avait qu'une envie courir rejoindre son tendre amour....

Au fil des jours....

Le rythme à présent s'était installé, entrainant avec lui le jeune couple. Depuis leur installation, de nombreux changement avaient eut lieu, car Weylin ne cessait de confectionner diverses choses pour améliorer leur quotidien, et ainsi remettre certains meubles à leur goût, bien qu'ils furent très utiles quelques semaines auparavant.

Suivant son exemple, Luz eut envie aussi de s'impliquer elle aussi à cette amélioration, et s'enferma de longues heures dans sa forge prétextant maintes commandes, afin de s'essayer à des ferronneries qu'elles n'avaient pour l'heure jamais tentées.

Les résultats ne se firent pas attendre, vu sa capacité d'adaptation, dans n'importe quelles circonstances, et l'andalouse réalisa même quelques pièces de vaiselle...

Les jours passèrent à une vitesse folle, et la fébrilité s'empara de la belle, à la veille de ses noces.
Enfin elle allait unir sa vie à la sienne, devant tous, car pour eux ils étaient liés depuis bien longtemps.



Le grand jour

Bien avant le chant du coq qu'elle percevait même au coeur de la cité thiernoise, bien avant le mouvement d'agitation des marchands qui installaient leur stand sur le marché, bien avant les premières lueurs de l'aube, la jeune femme était déjà réveillée, tant l'excitation était grande.
Sautant littéralement hors du lit, le grand jour était arrivé...

La cérémonie avait eut lieu... belles déclarations échangées, belles émotions qu'ils avaient tout deux partagés, hélas le bonheur fut de courte durée, lorsqu'on frappa à la porte tôt au lendemain des épousailles... suite à la soirée une bougie mal éteinte avait mis le feu à la taverne...

Envolés leurs rêves...

Les pas de Weylin approchaient, et pourtant elle n'osa sortir du lit, où depuis l'annonce, elle était recroquevillée sur elle même, tenant entre ses bras un oreiller.
Dans une minute il serait là , et la rassurerait, hélas pas une seule seconde, l'andalouse n'y cru.

La porte en bas s'ouvrit, et la voix chaude de son mari résonna:

"Chérie..."

Il n'en dit pas plus, nul besoin, elle savait leur taverne n'était plus. S'asseyant près de sa belle, Weylin, la mine dépitée, lui tendit le souvenir de leur rencontre, cette carte synonyme de tant de choses pour eux.

En un rien de temps elle fut dans ses bras, versant des larmes, qui hier étaient de joies, et ce matin de tristesse, et doucement le charpentier, tenta de l'apaiser, lui promettant qu'un jour ils la reconstruirait.
D'un signe de tête, Luz lui fit comprendre que non, et d'une voix fluette serrée par les diverses émotions qui se confondaient depuis la veille, elle parvint à lui dire:

"Tu sais ce voyage dont tu me parlais ....je crois qu'il est temps que nous le fassions, je ne me sens pas chez moi ici, et si je suis venue c'est pour toi seul, mon amour, mais là...j'ai besoin de reprendre la route un temps, besoin de me sentir de nouveau moi même, besoin de voir ma Lina..."

L'un contre l'autre, ils restèrent ainsi un long moment, Weylin baisant les cheveux de son aimée, s'enivrant d'elle...

A peine mariés, voilà que les chemins s'offraient à eux, enfin ils allaient prendre du bon temps loin bien loin de la cité thiernoise.
Pliant bagages, la brune se dit que le moment était venu, et pris de quoi écrire, ainsi avant le départ, elle déposerait son annonce à la mairie.
Chez elle désormais c'était ailleurs, mais toujours entre ses bras, et cela jamais ne changerait.

Une dernière fois l'hispanique regarda cette chaumière, remise en état qui avait abrité quelques temps à peine, mais ces instants avaient été heureux, et vivement elle espérait que les prochains à y vivre éprouverait autant de joie.

Baluchon en main, elle sortit mettre le tout dans la charrette attelée pour le départ, Weylin déjà prêt visiblement, elle lui tendit son bagage, et monta s'installer à l'avant, un panier repas sur les genoux débordant de bonnes choses qui mettait déjà la jeune femme en appétit, qui discrètement passa le bout de ses doigts dans le panier à la recherche ...
Du coin de l'oeil son époux la vit, et aussitôt elle détourna son geste, chassant une bête invisible, sous le regard amusé de ce dernier.

Lui volant amoureusement un baiser, Luz regarda une dernière fois sa maison, un brin triste après l'avoir autant investie, mais sans l'ombre d'un regret, au fond Thiers n'était pas sa ville, juste une ville où son amour avait grandit, mais vrai que sa vie lui manquait trop et qu'ici, elle étouffait.
Aussi après les noces, l'évidence était là pour le couple, qui se suffisait l'un à l'autre dans une autarcie ... si idyllique, car parfois connaitre la vraie nature des gens, s'avère décevante.
Songeant à ça, elle regarda un instant son époux qui en avait fait maintes fois les frais....suspecté à tord d'avoir voulu devenir un homme peu honnête, d'avoir changé... mais qui n'a pas un côté sombre en soi ?

Bien des gens, rencontrés ici et là aux gré de ses voyages, se sentaient au dessus du lot, bien meilleur prodiguant des conseils ou autres, ou juste en étant des suffisantes, mais partout elle se sentait à l'aise....ici ça n'était pas le cas, enfin pas vraiment car au début si elle était heureuse, hélas les couples ne sont que peu intéressants et rapidement répertoriés dans la catégorie à ne pas déranger...ainsi les amitiés s'éloignent au point de ne plus se comprendre, mais la vie est faite de la sorte....et trop précieuse pour perdre du temps.

Le coeur à présent léger, ils allaient rencontrer leur avenir...